Bring me to Life

C’était maintenant la troisième fois de la semaine qu’Eren se faisait plaquer contre un casier et pas des plus docilement non plus. Dans un environnement où tous agissent comme des animaux sauvages, la loi de la jungle domine le paysage. Cependant, lorsqu’on essaie de faire profil bas et qu’on cherche à éviter d’être découvert, répliquer et se battre n’aidaient pas du tout. Parfois, en ramassant ses livres au sol après qu’on s’en soit pris à lui pour la simple et bonne raison qu’il était différent, Eren se disait qu’il devrait faire comme tout le monde et se battre. S’ils savaient de quoi il était capable, ils y auraient pensé à deux fois avant de s’en prendre à lui. Malheureusement, le monde étant mal fait, Eren devait se contrôler et encaisser tous les coups et insultes qu’on lui adressait.

La vie de mutant, en effet, n’était pas facile pour Eren. Il aurait pu être né avec un pouvoir facile à camoufler comme celui de Mikasa, mais non… Évidemment, Eren devait hériter de ce qu’il considérait être le pire fardeau au monde. Bien sûr, il pouvait absorber l’énergie de ceux qu’il touchait et même, étrangement, partager le pouvoir de Mikasa lorsqu’il la touchait, mais ce n’était pas sans conséquences. Lorsqu’il entrait en contact avec quelqu’un d’autre, la personne se tordait immédiatement de douleur, allant d’un léger malaise jusqu’à des souffrances atroces et intolérables plus ils restaient en contact longtemps. Parfois, Eren se demandait s’il pourrait causer la mort de quelqu’un, simplement en posant un doigt sur sa peau pendant un certain temps. Ce genre de pensées lui levait le cœur et lui faisait, à tout coup, regretter d’être ce qu’il était.

Pour protéger les autres de son pouvoir malsain, Eren devait se couvrir des pieds à la tête, portant des chandails longs même dans les plus chaudes journées d’été et séchant les cours de gym à l’année longue. Lorsque possible, Eren évitait les endroits surpeuplés de l’école et longeait les murs en marchant en évitant les contacts visuels. Bien entendu, son comportement attira malgré lui l’attention des autres qui le considérèrent comme plus qu’étrange. Peut-être qu’Eren aurait dû socialiser avec d’autres personnes que sa sœur pour éviter d’être la victime des jeunes intimidateurs qui se plaisaient à l’insulter dès qu’ils le voyaient et le plaquer contre des casiers sans hésiter puisqu’il ne répliquait jamais.

Alors qu’Eren ramassait ses livres sur le sol, en regardant les jeunes qui venaient de le plaquer s’éloigner, il décida que s’en était assez. Tant pis pour son idée de rester incognito et de ne pas s’attirer d’ennui. Eren en avait assez. Après autant de temps à se laisser faire comme une poupée de chiffon et de retourner chez lui le cœur en miette parce que personne ne semblait vouloir l’accepter, Eren décida de se prendre en main. Il laissa ses livres au sol et marcha d’un pas décidé vers les jeunes qui marchaient dans le corridor en se ventant de leur dernier exploit. Sans réfléchir, Eren saisit celui qui l’avait plaqué par le bras et le tira pour que l’autre se retourne et lui fasse face. Sans plus tarder, Eren le saisit à la gorge sans appuyer fort, sachant que son pouvoir s’occuperait de ça, et le regarda droit dans les yeux.

«C’est la dernière fois que tu poses les mains sur moi. C’est compris?» cracha Eren avec le plus de haine et le ton le plus menaçant qu’il put produire. Il garda ses mains autour du coup de l’autre, voyant son visage passer du rose au mauve foncé, alors qu’il pouvait le voir se tordre de douleur. Il pouvait distinguer les voix de ceux qui les entouraient dans le corridor, sachant qu’il se faisait surement traiter de fou, de monstre, de psychopathe. Il avait tout entendu de toute façon. Après quelques secondes, Eren relâcha l’autre réalisant qu’il le tenait depuis beaucoup trop longtemps et le regarda s’effondrer sur le sol en convulsion. Autour d’eux, c’était la panique. Certains qui avaient assisté à la scène criaient et d’autres arrivaient en courant, si bien qu’Eren prit peur. Il avait fait les seules choses qu’il ne devait absolument pas faire dans sa situation : perdre le contrôle, laisser les autres voir de qui il était réellement.